
Vers 3–4 ans, les enfants commencent à comprendre l’intérêt du partage, mais il faut attendre 5–6 ans pour voir un partage spontané, régulier et durable.
Comment apprendre à un enfant à partager ? Voilà une question que beaucoup de parents se posent — souvent au moment des premières disputes autour d’un jouet ou d’un gâteau. Pourtant, le partage n’est pas une compétence naturelle chez l’enfant : c’est une aptitude sociale complexe, qui s’apprend avec le temps, l’expérience… et beaucoup de patience.
Dans cet article, découvrez comment accompagner votre enfant sans pression ni culpabilité, avec des outils concrets et bienveillants adaptés à chaque étape de son développement.
Avant 3 ans, l’enfant est dans une phase dite « égocentrique », selon le psychologue Jean Piaget. Il voit le monde à travers ses propres besoins, sans encore se représenter ceux des autres. Cela signifie qu’il peut prêter un jouet… puis le réclamer aussitôt, ou refuser catégoriquement qu’un autre enfant y touche. C’est parfaitement normal.
Entre 3 et 4 ans, les enfants commencent à :
jouer avec les autres (et non plus juste « à côté »)
comprendre que chacun a des envies différentes
faire les premiers compromis dans le jeu
Il faut souvent attendre 5 à 6 ans pour voir des comportements de partage durables et spontanés : tours de rôle, échanges, propositions. Et encore, cela dépend du tempérament et du contexte émotionnel de l’enfant.
Pour aller plus loin : Développement de l’enfant 0–6 ans – Naître et grandir
Partager, ce n’est pas juste « donner quelque chose à quelqu’un ». Pour un enfant, c’est :
renoncer temporairement à un objet auquel il tient
tolérer la frustration
faire confiance à l’autre pour le lui rendre
se mettre à la place d’autrui (début d’empathie)
et tout ça… sans garantie que ce soit agréable !
C’est pourquoi il est inutile — voire contre-productif — de forcer un enfant à prêter. Cela risque d’induire un sentiment d’injustice ou de perte, et de le braquer davantage.
Le jouet peut représenter bien plus qu’un simple objet pour un enfant. Il peut être :
un objet d’attachement ou de réassurance (surtout chez les tout-petits)
un moyen d’exister dans le groupe : « c’est à moi ! »
une tentative de garder le contrôle sur son environnement
un symbole de valeur affective (« papa me l’a offert, c’est précieux »)
Un enfant peut donc refuser de partager pour de bonnes raisons. Cela ne fait pas de lui un enfant égoïste ou mal élevé. Cela montre simplement qu’il a encore besoin d’apprendre à réguler ses émotions et à construire la confiance en soi et en l’autre.
Les enfants apprennent par mimétisme. Si vous partagez vous-même de façon fluide (« on partage la dernière part », « tiens, je te prête mon stylo »), vous montrez que le partage peut être naturel et agréable, sans que cela vous enlève quoi que ce soit.
L’idée n’est pas de moraliser, mais de créer des occasions d’imitation.
Quand votre enfant refuse de prêter un jouet, au lieu de lui dire « sois gentil, partage », vous pouvez dire :
« Je vois que tu tiens beaucoup à ce jouet. Tu n’as pas envie de le prêter, et c’est OK. »
Cela l’aide à identifier ses émotions (attachement, peur de perdre, jalousie), ce qui est la première étape vers la gestion émotionnelle… et donc, le partage futur.
Avant une visite ou une sortie, proposez à votre enfant de choisir 1 ou 2 jouets qu’il ne souhaite pas prêter. Ceux-ci seront mis de côté, tandis que les autres pourront être partagés. Cette méthode lui permet de garder le contrôle sur ce qui est précieux, tout en l’ouvrant progressivement à la mise en commun.
À partir de 3 ans, vous pouvez introduire la notion de temps partagé :
« Tu joues avec la voiture pendant 5 minutes, puis ce sera au tour de Lina. »
Un sablier visuel, une minuterie de cuisine ou une application dédiée peut aider l’enfant à visualiser le temps qui passe, et à se sentir rassuré sur la restitution du jouet.
Le partage est plus facile quand il ne s’agit pas de posséder mais de jouer ensemble. Privilégiez :
les puzzles à faire à deux
les jeux de construction collectifs
les activités de cuisine
les jeux de société coopératifs dès 4 ans
À découvrir sur Today Is Sunday : Nos jeux éducatifs et coopératifs
Dire « C’est bien, tu as partagé » revient parfois à conditionner l’amour à l’acte. Préférez des formulations centrées sur le vécu :
« Tu as prêté ta voiture, et vous avez beaucoup ri ensemble. »
« Vous avez trouvé une solution pour jouer à deux, c’est super ! »
Cela montre à votre enfant que le plaisir relationnel prime sur la possession.
Les disputes sont inévitables. Elles ne signifient pas que votre enfant « ne sait pas partager », mais qu’il apprend à négocier, affirmer ses limites et composer avec l’autre.
Plutôt que de dire « donne-lui maintenant », aidez les enfants à dialoguer :
« Vous voulez tous les deux ce jouet. Comment peut-on s’organiser ? »
« Tu peux lui proposer une alternative pendant qu’il attend ? »
Ressource utile : La colère chez l’enfant – Ameli Santé
Le partage peut être plus ou moins difficile selon le contexte :
Avec les frères et sœurs : il y a souvent des enjeux de territoire et de jalousie. Instaurer des espaces individuels (jouets personnels non partagés) et des temps de jeux collectifs aide à équilibrer.
À l’école ou à la crèche : l’enfant entre dans une logique de groupe. Le modèle coopératif de l’adulte, les règles communes et les outils visuels sont précieux.
Au parc ou chez les amis : ce sont souvent des contextes émotionnellement chargés. Anticiper avec des phrases comme « Il y aura plein de jouets, mais chacun en aura un à la fois » peut aider.
Non. Obliger un enfant à partager, c’est souvent :
lui imposer une renonciation sans consentement
créer un sentiment d’injustice (« l’autre gagne toujours »)
le pousser à se fermer émotionnellement
En revanche, vous pouvez :
proposer des alternatives
l’aider à verbaliser
lui donner des repères temporels
et lui faire confiance dans sa progression
Apprendre à partager est une compétence qui se construit sur plusieurs années, avec de nombreux essais, erreurs et ajustements. En tant que parent, votre rôle est de modéliser, sécuriser, et guider votre enfant, sans le juger ni le forcer.
Accompagner avec bienveillance, proposer des outils concrets et respecter son rythme : c’est le meilleur chemin vers un partage durable, sincère et autonome.
Vers 3–4 ans, les enfants commencent à comprendre l’intérêt du partage, mais il faut attendre 5–6 ans pour voir un partage spontané, régulier et durable.
Ce n’est pas inquiétant. L’enfant a peut-être besoin de se sentir plus sécurisé émotionnellement. Continuez à modéliser et à dialoguer sans forcer.
Proposez un tour de rôle avec un minuteur, une alternative équivalente ou laissez-les négocier avec votre aide bienveillante.